Après étude statistique réalisée sur un échantillon représentatif de plus de 400 structures utilisatrices Adelyce, faisons le point sur l’avancement du RIFSEEP qui peut atteindre près de 30% de la rémunération des agents.
Titulaires : un régime indemnitaire proportionnel à la taille des collectivités
Régime indemnitaire brut mensuel moyen par ETP, en €, pour les titulaires CNRACL
prime de fin d’année comprise au sens de l’article 111
% moyen du RI sur la rémunération totale brute, pour les titulaires CNRACL
La part du régime indemnitaire sur la rémunération brute des titulaires croît avec la taille des collectivités : de 16% dans les communes <30 M€ de masse salariale, à 19% dans les structures départementales où la proportion d’agents de catégories A et B est plus importante.
Elle atteint 29% dans les services départementaux d’incendie et de secours en raison d’indemnités spécifiques : indemnité de feu (19% du Traitement indiciaire brut), de responsabilité, de spécialité et de logement. L’évolution du RI des titulaires y est la plus dynamique, en moyenne +76€ par mois soit +912€ annuels entre 2015 et 2018.
Si son poids dans la rémunération apparait relativement stable sur les 4 dernières années, l’évolution du régime indemnitaire a pu avoir, en réalité, un double impact positif pour les fonctionnaires : bénéficiant de l’effet RIFSEEP dans un premier temps, ils ont ensuite pu profiter du PPCR pour transférer ces primes en points d’indice de traitement indiciaire, plus profitable pour le calcul de leurs futures retraites.
Le régime indemnitaire des titulaires n’en reste pas moins dynamique.
A noter : certaines primes, indexées à la valeur du point, ont également été revalorisées en juillet 2016 et février 2017.
MS : Masse salariale
Contractuels permanents : exception départementale
Régime indemnitaire brut mensuel moyen par ETP, en €, pour contractuels permanents
prime de fin d’année comprise au sens de l’article 111
Si le régime indemnitaire des contractuels permanents est légèrement plus fluctuant, sa part évolue elle aussi selon la taille de l’APUL : de 10% à 21%.
Son montant est globalement inférieur à celui des titulaires, excepté pour les conseils départementaux où les catégories A et B dépassent 50% des effectifs. Dans les départements, le contrat laisse place à la négociation de la rémunération y compris du régime indemnitaire. Celui-ci est supérieur à celui des titulaires en 2018 (+26€ mensuels soit +5%) et a un poids plus important dans la rémunération totale brute (20.8% contre 18.8% pour les titulaires).
Notons que le coût d’un agent est différent selon son statut : à indice et indemnité équivalents, un contractuel reviendra plus cher à la collectivité puisque son régime indemnitaire à lui est soumis à cotisations.
MS : Masse salariale
% moyen du RI sur la rémunération totale brute, pour les contractuels permanents
Le RIFSEEP, adopté avec prudence
Le RIFSEEP est principalement constitué de l’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) qui simplifie et remplace toutes les primes existantes répondant aux mêmes objectifs précédemment. Près de 70% des établissements utilisateurs d’Adelyce l’ont appliquée en 2018.
Parmi eux, seulement un tiers ont également mis en place la part variable du RIFSEEP : le complément indemnitaire annuel ou CIA.
Dans l’esprit du législateur, il est un outil managérial de motivation, valorisant l’engagement professionnel des agents. Il est établi sur des critères évalués lors de l’entretien individuel : réalisation d’objectifs, esprit d’équipe, investissement particulier ou encore prise d’initiative.
Déploiement du RIFSEEP en 2018
Répartition IFSE/CIA dans le RIFSEEP (Titulaires CNRACL)
Mais en 2018, les sommes allouées au CIA sont restées marginales : 6% du montant global annuel du dispositif RIFSEEP (IFSE +CIA) pour les titulaires, 5% pour les contractuels permanents.
Les collectivités qui n’ont pas encore déployé le CIA invoquent un manque de maturité sur la question, un manque de budget et un versement reporté en 2019.
Publication tardive des arrêtés, blocages politiques ou hiérarchiques, manque de moyens humains ou financiers, choix des critères d’évaluation…difficile d’établir un régime indemnitaire lisible, stimulant, et équitable.
Inégalités
Si le régime indemnitaire semble profiter davantage aux hommes dans la filière incendie et secours (+8% que les femmes en catégorie A), cela se confirme pour la filière police municipale (tous types de collectivités) où l’écart se creuse en fonction de la catégorie (+30% en catégorie A).
Cette tendance se vérifie globalement parmi les agents de catégorie A du bloc communal.
Dans les conseils départementaux, les écarts hommes/femmes peuvent atteindre 100€ par mois sur des catégories et filières identiques. Le chiffre monte à +219€ mensuel pour les hommes dans la catégorie A de la filière administrative et +136€ dans la catégorie B de la filière technique. La parité est respectée en catégories B et C de la filière administrative.
Régime indemnitaire moyen brut mensuel
Les filières incendie et secours et police municipale mises à part, les filières historiques de la fonction publique territoriale – administrative et technique – bénéficient du régime indemnitaire le plus élevé.
Les filières sportive, animation, culturelle, médico-sociale et sociale sont les moins bien loties : sous- représentées parmi les effectifs de la territoriale, elles sont également soumises à la fluctuation du temps de travail et recourent davantage aux contractuels.
Alors que le RIFSEEP tend à harmoniser le régime indemnitaire de la fonction publique, au sein de la territoriale, d’importantes disparités demeurent.
Il n’a pas suffisamment été employé pour corriger les inégalités entre filières, entre catégories, entre hommes et femmes.
De même, le déploiement du CIA reste encore marginal aujourd’hui : instaurer une rémunération « au mérite » n’apparaît pas si simple que ça.
50 % des collectivités Adelyce interrogées pensent même à une refonte du RIFSEEP d’ici 2022. Une vision sans doute alimentée par de récentes annonces gouvernementales – paradoxales – visant à finalement s’affranchir de la comparabilité avec le régime indemnitaire de l’Etat.
Encore loin de l’objectif, le RIFSEEP trouvera-t-il le « second souffle » nécessaire aux collectivités pour s’approprier ces nouveaux outils de pilotage, mieux structurer la rémunération des agents et rééquilibrer les inégalités ? Il leur en donne les moyens.