Pas simplement une question de rémunération
Selon Sophie Guihard, la gestion du personnel relève d’une démarche qui va bien au-delà de la rémunération et du seul pilotage de la masse salariale.
La définition d’une stratégie permet de refléter la vision globale d’une collectivité et lui donne les moyens de s’adapter à son environnement, tout en accompagnant les agents dans ces changements. Le maître mot, c’est l’anticipation. Anticiper devient un impératif : pour les emplois, les effectifs, les compétences.
Dans cette approche intégrée qu’est la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences), trois leviers majeurs doivent être actionnés pour piloter la masse salariale :
- Sortir de l’urgence et construire un projet commun de mandat
- Corréler les compétences et le projet commun
- Assurer une qualité de vie au travail.
Agir sur le long terme : oui mais…
La mise en œuvre d’un tel plan d’actions apparaît comme une réponse logique.
Mais est-ce bien réaliste ? Plusieurs contraintes peuvent être source de blocage dans cet idéal de gestion.
Durée du mandat politique
Pour qu’une collectivité puisse façonner un projet commun de gestion, il lui faut préalablement définir une stratégie qui soit en adéquation avec son projet politique.
Se pose ici une limite : celle de la durée du mandat politique qui est de 6 ans pour les assemblées délibérantes locales. En cas de changement de majorité politique, cela obligerait à repenser la trajectoire de gestion et qui peut être complètement différente.
Adéquation du projet commun aux besoins des citoyens
Les collectivités évoluent au gré de la société et des besoins des administrés.
C’est pourquoi la définition d’un « cap commun » dans une collectivité doit être évolutive de manière à s’adapter en permanence aux demandes de services des usagers.
Statut de la fonction publique territoriale trop rigide
Envisager une démarche prévisionnelle en matière de ressources humaines nécessite certains prérequis comme celui évoqué par Sophie Guihard « d’identifier les compétences nécessaires pour mener à bien son projet » […] et toute la difficulté réside « dans l’existence d’un volant de ressources inadaptées aux exigences du présent ».
Hormis la difficulté d’identification des compétences, la collectivité se heurte à la rigidité du statut de la fonction publique territoriale régi par des règles de carrière et d’emploi qui lui sont propres.
Ce qui peut conduire à des aberrations comme le montre l’exemple qui suit : certains postes ne sont pas accessibles à des agents bien qu’ils aient les compétences requises.
L’accès à la fonction publique territoriale par voie de concours participe également à ces difficultés.
La carrière d’un fonctionnaire restant avant tout axée sur une filière, et non sur un métier et encore moins une compétence, la mobilité métier n’existe quasiment pas.
D’ailleurs on observe très peu de mobilité dans la fonction publique territoriale (0.5% des agents ont une mobilité géographique et moins d’1% changent d’employeur).
Ainsi la gestion des ressources humaines ne dispose pas de grands moyens pour adapter les ressources aux besoins.
Plus de souplesse de gestion
La démarche d’anticipation de gestion des emplois et des compétences dans le monde des collectivités se heurte aujourd’hui à de nombreuses contraintes qui ne sont pas toutes contournables.
N’oublions pas la volonté politique de notre président de la république qui milite pour assouplir la fonction publique territoriale. Nous entrons dans une vague de réforme, comme l’a précisé Emmanuel Macron.
« Ce n’est pas la fin de la fonction publique, bien sûr nous garderons le statut des fonctionnaires mais il faut avoir une souplesse de gestion »
Une souplesse qui passerait par un élargissement du recours au contrat, ou encore une rémunération plus individualisée. Autant de pistes de réflexion qui permettraient d’adapter la gestion des ressources humaines à un vrai projet commun au sein d’une collectivité.